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libraire ordinaire : fils naturel du prince de Conti, il avait commencé une carrière diplomatique, qu’une cécité précoce interrompit. Sous la Révolution, il fonda une librairie, n’en continua pas moins à publier des ouvrages de son cru, et entra à l’Institut en 1799. Il en était donc membre lorsqu’il édita le premier roman de Sophie Gay : peu d’auteurs peuvent se vanter d’avoir un éditeur de pareille qualité[1].

Laure d’Estell, sans être un chef-d’œuvre, vaut sûrement mieux que la moyenne des productions du même genre qui paraissaient journellement. Sainte-Beuve vante le style net, courant et généralement pur, et les remarques fines, ce qui, sous sa plume, constitue un bel éloge. Les contemporains, les amis de l’auteur surtout, sonnent la fanfare de l’enthousiasme. Chénier envoie un billet de félicitations. Le vicomte de Ségur donne au Journal des Débats un article élogieux, inséré depuis dans ses Œuvres diverses. « Mme Geoffrin disait un jour : « Vous m’assurez que cet homme est simple ; mais est-il simple avec simplicité ? » Voilà le grand mérite du style de Mme Gay… On y remarque un naturel, une facilité si aimable, si rare, que chacun croit deviner le besoin qu’elle a eu d’écrire ce charmant ouvrage… Les personnages sont si bien établis, la gradation de l’intérêt marche avec une si profonde connaissance des ressources de l’art, que la louange même doit s’arrêter, pour laisser au public des jouissances si

  1. Lepeintre : Suite du répertoire du Théâtre-Français, Paris, 1823, L, 177. — Lov., 2038, f° 46. — Sainte-Beuve : Lundis, VI, 52. — Testament de Sophie Gay, arch. Franchet d’Esperey.