Page:Marais - Le Reflet sur la vitre (Les Annales politiques et littéraires, édition du 4 mai), 1919.djvu/2

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Le jeune homme et la jeune fille, un peu cérémonieux, marchaient au milieu du trottoir, côte à côte, sans oser parler, ils avaient épuisé la série de banalités et craignaient d’exprimer des propos personnels. En arrière, deux couples âgés, leurs parents respectifs, les suivaient admirant d’un regard attendri ce jeune couple qu’ils avaient fiancé.

La jeune fille était d’une beauté rare et d’une élégance parfaite. Son fiancé, un peintre de talent, avait été subjugué, dès qu’il l’avait vue, par cette pureté de lignes, cette figure sans défaut, cette harmonie des gestes qui faisait vivre la grâce. À présent, il réfléchissait, inquiet :

« Comme ç’a été vite !… En somme, je ne la connais pas. Je l’ai rencontrée dans une soirée : aussitôt, des importuns se sont intéressés à notre bonheur ; on s’est dépêché de nous séparer en nous rapprochant trop rapidement ; des tiers s’empressaient d’annoncer officiellement notre amour, sans me laisser le temps de le lui déclarer. Résultat : je l’épouse dans trois semaines… et je ne sais rien de son âme. » Il s’apercevait qu’il ignorait tout d’elle, — sauf son visage. Mais il