Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/309

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Elle m’adore… D’abord, c’est une femme à béguins, la patronne… Quand elle a épousé Jules Bouvreuil, il ne possédait pas un sou et c’est la dot d’Isabelle qui a commencé sa fortune : elle l’a choisi, simplement parce qu’il avait un mètre quatre-vingts de hauteur de taille. Et sais-tu aussi pourquoi, dans l’intimité, j’ai surnommé Isabelle : la Duchesse de Ferrare ? Voici. C’est à la suite d’une confidence qu’elle m’a faite… Seulement, je te la répète sous le sceau du secret, car il n’y a que monsieur Bouvreuil et moi qui connaissions l’histoire, avec les deux intéressés, et il ne faut pas qu’elle s’ébruite jamais… Tu comprendras. Il y a trois ans, Isabelle rencontrait, chez une amie, le grand peintre Watelet… Tu as déjà vu Watelet ?

— Oui, il a exécuté mon portrait, voilà six mois.

J’ai répondu brièvement ; je retiens mon souffle tant j’appréhende que la moindre chose n’arrête le bavard grisé de vin, étourdi par le flot de ses propres paroles :

— Alors, tu as pu constater que Watelet est un bel homme, continue M. Yves. Madame Bouvreuil tomba amoureuse folle de ce grand