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le charme de l’histoire

que la seule valeur lui fournit toute la fermeté qui lui est nécessaire dans les périls de la guerre » (Pensées supprimées, 40). — La Rochefoucauld, on le voit, était loin de dédaigner la fermeté d’âme, car ici, sous le nom d’intrépidité, il la met au-dessus de la bravoure militaire ; mais il lui donne dans son livre une place beaucoup moins importante. Qu’il désigne la bravoure militaire sous le nom de courage[1], ou plus habituellement sous le nom de valeur[2], il l’étudie sous toutes ses formes[3], distinguant le courage contre le mousquet ou contre l’épée, en rase campagne ou devant des retranchements, en public ou sans témoins, en plein jour ou dans l’ombre de la nuit ; il en recherche les mobiles secrets ; il en démasque les contradictions et les défaillances ; il y revient souvent, et l’on voit qu’il y pense toujours. Ainsi, même dans cette tirade célèbre par laquelle il clôt son livre, en affirmant, après « la fausseté de tant de vertus, la fausseté du mépris de la mort » (504), c’est encore la mort du soldat sur le champ de bataille qui domine sa pensée.

Le courage devant l’ennemi était, en effet, le plus nécessaire des courages dans un siècle militaire, le plus familier à La Rochefoucauld qui avait

  1. 215, 504, P. S. 616.
  2. 1, 150, 213, 214, 215, 216, 220, 365, P. S. 40.
  3. 213, 214, 215, 216, 217, 219, 220, 221, etc.