Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/184

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entre les bois de Thémiscire, où jadis les Amazones vinrent chercher un refuge, par le motif que je vais exposer.

(18) Ces guerrières des temps passés, après avoir anéanti par leurs continuelles et sanglantes incursions tous les États leurs voisins, aspiraient encore à frapper de plus grands coups. Confiantes dans leurs forces, et entraînées par une ardeur de conquête, elles allèrent, passant sur le corps d’une multitude de peuples, chercher dans les Athéniens de plus redoutables adversaires. La lutte fut opiniâtre ; mais enfin leur armée plia, par la déroute de la cavalerie, qui garnissait les ailes ; et toutes les Amazones mordirent la poussière.

(19) À la nouvelle de ce désastre, celles qui, moins propres à porter les armes, étaient restées dans leurs foyers, se voyant réduites à l’extrémité, et redoutant les représailles de voisins irrités des maux qu’elles leur avaient fait souffrir, se retirèrent sur les bords plus tranquilles du Thermodon. Leur postérité y multiplia, et plus tard, rentrée en force dans son ancienne patrie, redevint la terreur de toutes les nations étrangères.

(20) Non loin de là le mont Carambe s’élève en pente douce vers le septentrion, séparé par deux mille cinq cents stades de mer du promontoire de Crioumétopon, en Tauride. À partir du fleuve Halys, tout le littoral s’étend en ligne aussi directe que la corde tendue entre les deux extrémités de l’arc.

(21) À ses confins l’on trouve les Dahas, le plus belliqueux peuple de la terre, et les Chalybes, qui, les premiers, arrachèrent. le fer de la mine. Les vastes contrées qu’on rencontre ensuite sont occupées par les Byzares, les Sapires, les Tibarènes, les Mossynèques, les Macrons et les Philyres ; peuples sans communication avec nous jusqu’à ce jour.

(22) Mais à peu de distance sont les tombes de trois héros, Sthénélus, Idmon et Tiphys ; le premier, compagnon d’Hercule, et blessé mortellement en combattant avec lui les Amazones ; le second, devin des Argonautes ; et le troisième, leur habile pilote.

(23) Au-delà de cette contrée se trouve l’antre d’Aulion et le fleuve Callichore, ainsi nommé parce que Bacchus, après avoir en trois ans accompli la conquête des Indes, célébra son retour, sur ses bords ombragés et fleuris, par des chœurs de danse et des orgies ; mystères que quelques-uns appellent Triétériques.

(24) On arrive ensuite aux célèbres demeures des Camarites et au Phase, dont les eaux murmurantes baignent les peuples de Colchide, race issue anciennement de l’Égypte. Au nombre de ces villes il faut citer Phase, qui prend son nom du fleuve, et Dioscure, encore importante de nos jours, dont la fondation est attribuée à Amphitus et Cercius, cochers de Castor et de Pollux.

(25) Tout auprès sont les Achéens, qui, suivant quelques auteurs, après une guerre antérieure à celle dont Hélène fut le sujet, rejetés sur les rives du Pont par la tempête, trouvant des ennemis partout et ne pouvant s’établir nulle part, finirent par occuper la cime de montagnes couvertes de neiges éternelles. L’âpreté du climat fit contracter à ces émigrés l’habitude de vivre de rapine, et les rendit bientôt les plus féroces des brigands. Touchant les Cercètes leurs voisins, on ne sait rien qui soit digne de remarque.