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Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/307

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main, qui prennent note exacte de la composition des services et du nombre des mets. On dirait l’intérieur d’une école, moins le professeur.

(14) D’autres, qui ont horreur de l’étude à l’égal du poison, lisent avec intérêt Juvénal et Marius Maximus. Mais, malgré tout leur loisir, ne leur demandez pas de sacrifier même un instant à tout autre livre. Pourquoi ? C’est ce que je n’ai pas l’esprit de deviner.

(15) Pour leur honneur cependant, pour celui de leurs familles, ils ne feraient pas mal d’étendre un peu le cercle de leurs lectures. On peut leur citer l’exemple de Socrate. Condamné à mort et déjà en prison, le sage priait un musicien qui chantait avec grâce un hymne de Stésichore de lui apprendre à donner le ton à ce morceau. "À quoi bon ? disait l’autre. Vous n’avez plus que ce jour à vivre. — À savoir cela de plus avant de mourir, répondait Socrate."

(16) Combien peu de l’espèce de gens dont je parle savent punir avec discernement ! Un esclave est-il trop lent à leur apporter l’eau chaude ? vite ils lui font appliquer cent coups d’étrivières. Mais si le coquin a tué un homme avec intention, son maître ne se gênera pas pour répondre à ceux qui demanderaient la tête du meurtrier : "Que voulez-vous ? c’est un misérable. Mais à l’avenir le premier de mes drôles qui s’avisera d’en faire autant aura, je vous jure, affaire à moi."

(17) Il est reçu dans ce monde-là qu’on manque moins à un homme en tuant son frère, qu’en refusant d’aller dîner chez lui. Trouvez-moi le sénateur qui ne préfère la perte de son patrimoine à l’affront de voir faire défaut à une invitation qu’il a si mûrement réfléchie !

(18) Un de ces grands personnages a-t-il à faire une excursion tant soit peu hors de ses habitudes, pour visiter ses terres par exemple, ou pour se donner le plaisir de la chasse (bien entendu sans y prendre une part active), il s’imagine avoir égalé les voyages de César et d’Alexandre, n’y eût-il même qu’à se faire voiturer, dans les gondoles peintes du lac Averne, jusqu’à Putéoli ou jusqu’à Caiète, si le jour est chaud surtout. Qu’une mouche vienne à se poser sur la frange de soie de son éventail doré ; que le moindre rayon de soleil pénètre par quelque interstice de son parasol, le voilà qui gémit de n’avoir pas vu le jour chez les Cimmériens.

(19) Voyez-le sortir des étuves de Silvanus ou des eaux salutaires de Mamaea, tout le corps soigneusement essuyé du linge le plus fin. Avec la garde-robe qu’on met à sa disposition, dix hommes trouveraient à se vêtir. Chaque pièce est fraîchement tirée de dessous presse ; encore veut-il lui-même en explorer le lustre au grand jour. Enfin son choix est fait ; le voilà qui retourne au logis, tous les doigts surchargés de bagues, qu’en se baignant il a eu soin de remettre à son valet de chambre, de peur que l’humidité ne les ternisse

(20) TEXTE LACUNAIRE

(21) Il est de ces personnages qui s’offusquent (pruderie assez peu commune cependant) d’être appelés joueurs de dés. Tesseraires, à la bonne heure : la différence à peu près de voleur à filou. Convenons-en toutefois : à Rome aujourd’hui les amitiés sont bien tièdes ; mais parlez-moi