Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/348

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de ces contrées. C’est dans cette ville que Faustin, notaire d’armée, fils de la sœur du préfet du prétoire Vivence, fut condamné par Probus à périr de la main du bourreau, après avoir passé par la torture. Son crime était d’avoir tué un âne, pour, disait l’accusation, faire servir son corps à une opération magique ; selon le prévenu, pour se procurer un remède contre la chute des cheveux.

(12) On faisait encore un grief contre lui de ce qu’un certain Nigrinus lui ayant demandé en plaisantant de le faire notaire, il avait répondu, sur le même ton : "Faites-moi empereur". On voulut donner à ce badinage une portée qui leur coûta la vie à tous deux, et à bien d’autres.

(13) Valentinien s’étant fait précéder du corps d’infanterie de Mérobaud, qu’il chargea, de concert avec Sébastien, de mettre à feu et à sang les bourgades des barbares, transporta rapidement son camp à Acincum. Là un pont de bateaux fut construit éventuellement ; mais ce fut un autre point qu’on choisit pour passer sur les terres des Quades. Ceux-ci suivaient les mouvements de l’armée du haut des montagnes abruptes où l’incertitude et l’effroi les avaient fait se réfugier avec leurs familles. Grande était leur stupeur en voyant inopinément se déployer chez eux les enseignes impériales.

(14) Valentinien, par une marche rapide, surprit et égorgea, sans distinction d’âge, une partie de la population, incendia ses demeures, et revint à Acincum sans avoir perdu un seul soldat. Cependant, l’automne s’enfuyait à grands pas. Il fallait songer aux quartiers d’hiver, et les choisir eu égard à la rigueur du climat de ces contrées. Aucune autre localité que Savaria ne paraissait offrir les conditions de séjour. Mais cette place, ruinée par plus d’un siège, n’était pas tenable au point de vue militaire.

(15) Valentinien s’en éloigne donc à regret ; et, côtoyant le cours du fleuve, il arriva à Brigetio, où se trouvait un camp retranché et des forts en bon état. Durant son repos prolongé dans cette ville, il eut des pronostics nombreux de sa fin prochaine.

(16) Déjà quelques jours avant son arrivée, des comètes (nous avons donné l’explication de ce phénomène) avaient annoncé la catastrophe de quelque haute fortune. Antérieurement, lorsqu’il était encore à Sirmium, la foudre avait réduit en cendres le palais impérial, la curie, et une partie des bâtiments du Forum. Pendant son séjour à Savaria, un hibou qui s’était perché sur le faîte des bains de l’empereur fit entendre des cris funèbres, sans que les pierres ni les flèches dont il était le point de mire eussent réussi à le déloger.

(17) Au moment où le prince avait quitté cette ville pour se mettre à la tête de l’expédition, il avait voulu sortir par la même porte qui avait servi à son entrée, circonstance dont il eût tiré le présage d’un prompt retour dans les Gaules. Mais pendant qu’on déblayait la sol, qui se trouvait encombré, le passage fut fermé de nouveau par la chute d’une massive porte de fer, qu’on essaya vainement d’enlever à force de bras ; de sorte que, pour ne pas perdre plus de temps en efforts inutiles, le prince dut se résigner à sortir par une autre porte.

(18) La nuit qui précéda son dernier jour, il