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NOTICE

guerite étudiait sous leur direction le latin, la philosophie, et la théologie qu’elle aima toujours de préférence. Singulière prédilection dans une femme dont le nom ne réveille plus que des idées de frivolité spirituelle et de licence antichrétienne, parce qu’on connaît mal ses ouvrages, et plus mal encore sa vie. Au xviiie siècle, une autre femme, rendue célèbre par l’amitié de Voltaire, ne pouvant être citée pour sa figure ni pour son esprit, se fit géomètre par ostentation. Le goût de madame du Châtelet pour les mathématiques fut déjà le résultat d’un calcul ; il n’y avait rien de tel dans le goût de Marguerite pour la théologie ; d’ailleurs elle n’avait pas besoin de cette ressource pour être distinguée, et quand elle n’aurait pas eu la solidité d’esprit que supposent ces études volontaires, elle avait abondamment la grâce piquante et enjouée, qui réussit mieux et plus vite dans le monde.

Pourvue de tant d’avantages, et princesse encore par-dessus, on conçoit que Marguerite ait excité autour d’elle une admiration sincère et retentissante. Sur le bruit de sa renommée, Charles-Quint, qui n’était alors que roi d’Espagne, envoya des ambassadeurs la demander en mariage. On ne dit pas quel motif s’opposa à cette union, qui aurait eu sur le règne de Fran-