Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 3.djvu/465

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femme, à cause de ses douze mille livres de rente.

LÉLIO

Tant que le cœur m’en dira.

LE CHEVALIER

T’a-t-on dit qu’elle fût jolie ?

LÉLIO

On m’écrit qu’elle est belle ; mais, de l’humeur dont je suis, cela ne l’avance pas de beaucoup. Si elle n’est pas laide, elle le deviendra, puisqu’elle sera ma femme ; cela ne peut pas lui manquer.

LE CHEVALIER

Mais, dis-moi, une femme se dépite quelquefois.

LÉLIO

En ce cas-là, j’ai une terre écartée qui est le plus beau désert du monde, où Madame irait calmer son esprit de vengeance.

LE CHEVALIER

Oh ! dès que tu as un désert, à la bonne heure ; voilà son affaire. Diantre ! l’âme se tranquillise beaucoup dans une solitude : on y jouit d’une certaine mélancolie, d’une douce tristesse, d’un repos de toutes les couleurs ; elle n’aura qu’à choisir.

LÉLIO

Elle sera la maîtresse.

LE CHEVALIER

L’heureux tempérament ! Mais j’aperçois la Comtesse.