Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 4.djvu/343

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je me sentis émue ; il semblait que mon cœur devinait Hermocrate.

HERMOCRATE

Non, je ne saurais plus supporter ce récit. Au nom de cette vertu que vous chérissez, Aspasie, laissons là ce discours ; abrégeons, quels sont vos desseins ?

PHOCION

Ce récit vous paraît frivole, il est vrai ; mais le soin de rétablir ma raison ne l’est pas.

HERMOCRATE

Mais le soin de garantir la mienne doit m’être encore plus cher ; tout sauvage que je suis, j’ai des yeux, vous avez des charmes, et vous m’aimez.

PHOCION

J’ai des charmes, dites-vous ? Eh quoi ! Seigneur, est-ce que vous les voyez, et craignez-vous de les sentir ?

HERMOCRATE

Je ne veux pas même m’exposer à les craindre.

PHOCION

Puisque vous les évitez, vous en avez donc peur ? Vous ne m’aimez pas encore ; mais vous craignez de m’aimer : vous m’aimerez, Hermocrate, je ne saurais m’empêcher de l’espérer.

HERMOCRATE

Vous me troublez, je vous réponds mal, et je me tais.

PHOCION

Eh bien ! Seigneur, retirons-nous, marchons, rejoignons Léontine ;