Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/122

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J’en convenais avec elle, et dans les dispositions où j’étais, il ne me fallait peut-être plus qu’une visite ou deux à ce couvent pour me déterminer à m’y jeter, sans un coup de hasard qui me changea tout d’un coup là-dessus.

Un jour que ma veuve était indisposée, et qu’il y avait plus d’une semaine que nous n’avions été à ce couvent, j’eus envie d’y aller passer une heure ou deux, et je priai la veuve de me donner sa femme de chambre pour me mener. J’avais un livre à rendre à ma bonne amie la religieuse, que je demandai, et que je ne pus voir ; un rhumatisme auquel elle était sujette la retenait au lit ; ce fut ce qu’elle m’envoya dire par une de ses compagnes qui venaient ordinairement me trouver au parloir avec elle.

Celle qui me parla alors était une personne de vingt-cinq à vingt-six ans, grande fille d’une figure aimable et intéressante, mais qui m’avait toujours paru moins gaie, ou, si vous le voulez, plus sérieuse que les autres ; elle avait quelquefois un air de mélancolie sur le visage, que l’on croyait naturel, et qui ne rebutait point, qui devenait même attendrissant par je ne sais quelle douceur qui s’y mêlait. Il me semble que je la vois encore avec ses grands yeux languissants ;