Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/178

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Je voulus l’interrompre ici pour essayer de l’attendrir sur ce malheureux fils. Mais elle ne m’écouta point.

Tais-toi, me dit-elle, mon parti est pris. Ce n’est point par humeur que je suis inflexible ; il n’est pas question ici de bonté, mais d’une indulgence folle et criminelle qui nuirait à l’ordre et à la justice humaine et divine. L’action de Dursan fut affreuse ; le misérable ne respecta rien. Et tu veux que je donne un exemple d’impunité, qui serait peut-être funeste à ton fils même, si jamais tu en as un ! Si le mien, comme a fait autrefois ton père, qui fut traité avec trop de rigueur, s’était marié, je ne dis pas à une fille de condition, mais du moins de bonne famille, ou simplement de famille honnête, quoique pauvre, en vérité, je me serais rendue ; je n’aurais pas regardé au bien, et je ne serais pas aujourd’hui à lui faire grâce ; mais épouser une fille de la lie du peuple, et d’une famille connue pour infâme parmi le peuple ! je n’y saurais penser qu’avec horreur. Revenons à ce que je disais.

Il ne me reste pour tout héritier que ton oncle Tervire, qui est déjà assez riche, et qui l’est de ton bien. Il a profité durement du malheur de ton père, m’a-t-on dit ; il ne l’a jamais ni consolé ni secouru. Il se réjouirait encore du malheur de mon fils et du sujet