Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/179

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de mes larmes ; ainsi je ne veux point de lui ; il jouit d’ailleurs de l’héritage de tes pères, et n’en prend pas plus d’intérêt à ton sort. Je songe aussi que tu n’as pas grand secours à attendre de ta mère. Tu mérites une meilleure situation que celle où tu resterais, et ma succession servira du moins à faire la fortune d’une nièce que j’aime, dont je vois bien que je suis aimée, qui craint de me perdre, qui me regrettera, j’en suis sûre, toute mon héritière qu’elle sera, et que mon fils, qui peut n’être pas mort, ne trouvera pas sans pitié pour lui dans la misère où il est peut-être ; ta reconnaissance est une ressource que je lui laisse. Voilà, ma fille, de quoi il est question dans le papier cacheté que tu vois ; j’ai cru devoir me hâter de l’écrire, et je t’y donne tout ce que je possède.

Je ne lui répondis que par un torrent de larmes. Ce discours, qui m’offrait partout l’image de sa mort, m’attendrit et m’effraya tant, qu’il me fut impossible de prononcer un mot ; il me sembla qu’elle allait mourir, qu’elle me disait un éternel adieu, et jamais sa vie ne m’avait été si chère.

Elle comprit le sujet de mon saisissement et de mes pleurs. Je m’étais assise ; elle se leva pour s’approcher