Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/193

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vendu le diamant dont la vente servira à vous acquitter, et j’ai sur moi vingt écus que vous nous devrez, et que voilà, ajoutai-je.

Quoi ! mademoiselle, me répondit-il en souriant doucement et d’un air reconnaissant, vous me remettez la bague, nous vous sommes inconnus, vous ne me demandez ni nom ni billet, et vous ne m’en offrez pas moins cet argent ! Vous avez raison, monsieur, lui dis-je ; on pourrait d’abord regarder cela comme imprudent, je l’avoue ; mais vous êtes assurément un jeune homme plein d’honneur ; on voit bien que vous venez de bon lieu, et je suis persuadée que je ne hasarde rien. À quoi d’ailleurs nous serviraient votre billet et votre nom, si vous n’étiez pas ce que je pense ? Quant au diamant, je ne vous le rends qu’afin que vous le vendiez, monsieur ; c’est avec lui que vous me payerez. Cependant ne vous pressez point ; il vaut, dit-on, plus de deux cents francs ; prenez tout le temps qu’il faudra pour vous en défaire sans y perdre. Et je le lui présentais, en lui parlant ainsi.

Je ne sais, mademoiselle, me répondit-il en le recevant, de quoi nous devons vous être plus obligés, ou du service que vous voulez nous rendre, ou du soin que vous prenez pour nous le déguiser ; car on ne prête point à des inconnus : c’est vous en dire assez ; et mon père et ma mère seront aussi pénétrés que moi de vos bontés. Mais je venais ici pour vous dire, mademoiselle, que nous ne sommes plus dans l’embarras, et que depuis hier nous avons trouvé une amie qui nous a prêté tout ce qu’il nous fallait.