Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/194

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Mme Dursan, qui entra alors dans la salle, m’empêcha de lui répondre. Il se douta bien que c’était ma tante, et lui fit une profonde révérence.

Elle fixa les yeux sur lui, en le saluant à son tour avec une honnêteté plus marquée que je ne l’aurais espéré, et qu’elle crut apparemment devoir à sa figure, qui était fort noble.

Elle fit plus, elle s’arrêta pour me dire : N’est-ce pas monsieur qui vous avait confié la bague que vous m’avez montrée, ma nièce ? Oui, madame ; mais il n’est plus question de cela, lui répondis-je, et monsieur ne la vendra point. Tant mieux, reprit-elle, il aurait eu de la peine à s’en défaire ici. Mais, quoique je ne m’en sois pas accommodée, ajouta-t-elle en s’adressant à lui, pourrais-je vous être bonne à quelque chose, monsieur ? Vos parents, à ce que m’a dit ma nièce, sont nouvellement arrivés en ce pays-ci, ils y ont des affaires, et s’il y avait occasion de les y servir, j’en serais charmée.

J’aurais volontiers embrassé ma tante, tant je lui savais gré de ce qu’elle venait de dire ; le jeune homme rougit pourtant, et j’y pris garde ; il me parut embarrassé. Je n’en fus point surprise : il se douta bien que ma tante, à cause de sa mauvaise fortune, avait été curieuse de voir comment il était fait, et on n’aime point à être examiné dans ce sens-là ; on est même honteux de faire pitié.

Sa réponse n’en fut cependant ni moins polie ni moins respectueuse. J’instruirai mon père et ma mère de l’intérêt que vous daignez prendre à leurs affaires,