Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/403

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d’une personne qui veut n’en point douter pour pouvoir en rire en toute confiance ; cela serait plaisant, Toinette, tu vaux pourtant mieux qu’elle. Voilà tout ce que Toinette en tira, et je l’aurais bien deviné ; car je connaissais madame.

Geneviève, qui s’était méprise au ton dont je lui avais répondu sur les présents de monsieur, et qui alors en était abondamment fournie, vint m’en montrer une partie, pour m’accoutumer par degrés à voir le tout.

Elle me cacha d’abord l’argent, je ne vis que des nippes, et de quoi en faire de toutes sortes d’espèces, habits, cornettes, pièces de toile et rubans de toutes couleurs ; et le ruban lui seul est un terrible séducteur de jeunes filles aimables, et femmes de chambre !

Peut-on rien de plus généreux ? me disait-elle, me donner cela seulement parce que je lui plais !

Oh ! lui disais-je, je n’en suis pas surpris ; l’amitié d’un homme pour une jolie fille va bien loin, voyez-vous, vous n’en resterez pas là. Vraiment je le crois, me repartit-elle, car il me demande souvent si j’ai besoin d’argent. Eh ! pardi, sans doute vous en avez besoin, lui dis-je ; quand vous en auriez jusqu’au cou, il faut en avoir par-dessus la tête : prenez toujours, s’il ne vous sert de rien, je m’en accommoderai, moi, j’en trouverai le débit. Volontiers, me dit-elle, charmée du goût que j’y prenais, et des conjectures favorables qu’elle en tirait pour le succès de ses vues ; je t’assure que j’en prendrai à cause de toi, et que tu en auras dès demain peut-être ; car il n’y a point de jour où il ne m’en offre.