Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/407

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avant, votre bon ami me fait peur ; en un mot, sa bonne affection n’est peut-être qu’une simagrée ; je me doute qu’il y a sous cette peau d’ami un renard qui ne demande qu’à croquer la poule ; et quand il verra un petit roquet comme moi la poursuivre, je vous laisse à penser ce qu’il en adviendra, et si cet hypocrite de renard me laissera faire.

N’est-ce que cela qui t’arrête ? Me dis-tu vrai ? me repartit-elle. Assurément ! lui dis-je. Eh bien ! je vais travailler à te mettre en repos là-dessus, me répondit-elle, et à te prouver qu’on n’a pas envie de te disputer ta poule. Je serais fâchée qu’on te surprît dans ma chambre, séparons-nous ; mais je te garantis notre affaire faite.

Là-dessus je la quittai un peu inquiet des suites de cette aventure, et avec quelque repentir d’avoir accepté de son argent ; car je devinai le biais qu’elle prendrait pour venir à bout de moi : je m’attendis que monsieur s’en mêlerait, et je ne me trompai pas.

Le lendemain un laquais vint me dire de la part de notre maître d’aller lui parler, je m’y rendis fort embarrassé de ma figure. Eh bien ! me dit-il, mons Jacob, comment se comporte votre jeune maître ? Etudie-t-il assidûment ? Pas mal, monsieur, repris-je. Et toi, te trouves-tu bien du séjour de Paris ?

Ma foi, monsieur, lui répondis-je, j’y bois et j’y mange d’aussi bon appétit qu’ailleurs.

Je sais, me dit-il, que madame t’a pris sous sa protection, et j’en suis bien aise : mais tu ne me dis pas tout ; j’ai déjà appris de tes nouvelles ; tu es un compère ; comment