Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/443

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fût pas ; car je m’imagine qu’il fait bon sous votre direction, madame Catherine ; vous avez l’air si avenant, si raisonnable ! Eh ! eh ! reprit-elle, je fais du mieux que je peux, que le ciel nous assiste ! chacun a ses fautes et je n’en chôme pas ; et le pis est, c’est que la vie se passe, et que plus l’on va, plus on se crotte ; car le diable est toujours après nous, l’Eglise le dit : mais on bataille ; au surplus, je suis bien aise que nos demoiselles vous prennent, car vous me paraissez de bonne amitié. Hélas ! tenez, vous ressemblez comme deux gouttes d’eau à défunt Baptiste, que j’ai pensé épouser, qui était bien le meilleur enfant, et beau garçon comme vous ; mais ce n’est pas là ce que j’y regardais, quoique cela fasse toujours plaisir. Dieu nous l’a ôté, il est le maître, il n’y a point à le contrôler ; mais vous avez toute son apparence ; vous parlez tout comme lui : mon Dieu, qu’il m’aimait ! Je suis bien changée depuis, sans ce que je changerai encore ; je m’appelle toujours Catherine, mais ce n’est plus de même.

Ma foi ! lui dis-je, si Baptiste n’était pas mort, il vous aimerait encore ; car moi qui lui ressemble, je n’en ferais pas à deux fois. Bon ! bon ! me dit-elle en riant, je suis encore un bel objet ; mangez, mon fils, mangez ;