Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/509

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deux heures après, il n’y avait plus rien à y mettre ; en voilà le récit bien véritable.

Quoi ! me répondit-elle, si tu avais été plus riche et en situation de me dire : Je vous aime, mademoiselle, tu me l’aurais dit, Jacob ?

Qui ? moi ? m’écriai-je ; eh ! merci de ma vie, je vous l’aurais dit avant que de parler, tout ainsi que je l’ai fait, ne vous déplaise ; et si j’avais été digne que vous m’eussiez envisagé à bon escient, vous auriez bien vu que mes yeux vous disaient des paroles que je n’osais pas prononcer ; jamais ils ne vous ont regardée qu’ils ne vous aient tenu les mêmes discours que je vous tiens ; et toujours je vous aime, et quoi encore ? je vous aime ; je n’avais que ces mots-là dans l’œil. Hé bien, mon enfant, me répondit-elle en jetant un soupir qui partait d’une abondance de tendresse, tu viens de m’ouvrir ton cœur, il faut que je t’ouvre le mien.

Quand tu m’as rencontrée, il y avait longtemps que l’humeur difficile de ma sœur m’avait rebutée de son commerce ; d’un autre côté je ne savais quel