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Page:Marmontel - Mémoires de Marmontel - M. Tourneux, Lib. des biolio., 1891, T1.djvu/73

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un lit de cailloux un petit ruisseau d’eau limpide, et, sur les bords, le thym, la lavande, la marjolaine, le serpolet, enfin les plantes dont la fleur avoit le plus d’attraits pour elles, leur offroient les prémices de la belle saison. Mais, lorsque la montagne commençoit à fleurir, et que ses aromates répandoient leurs parfums, nos abeilles, ne daignant plus s’amuser au butin de leur petit verger, alloient chercher au loin de plus amples richesses ; et, en les voyant revenir chargées d’étamines de diverses couleurs, comme de pourpre, d’azur et d’or, ma tante me nommoit les fleurs dont c’étoit la dépouille.

Ce qui se passoit sous mes yeux, ce que ma tante me racontoit, ce que je lisois dans Virgile, m’inspiroit pour ce petit peuple un intérêt si vif que je m’oubliois avec lui, et ne m’en éloignois jamais sans un regret sensible. Depuis, et encore à présent, j’ai tant d’amour pour les abeilles que sans douleur je ne puis penser au cruel usage où l’on est, dans certains pays, de les faire mourir en recueillant leur miel. Ah ! quand la ruche en étoit pleine, chez nous c’étoit les soulager que d’en ôter le superflu ; mais nous leur en laissions abondamment pour se nourrir jusqu’à la floraison nouvelle, et l’on savoit, sans en blesser aucune, enlever les rayons qui excédoient leur besoin.

Dans les longues vacances de la fin de l’année,