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vérité qu’il avait à bord beaucoup de caisses d’argent qu’il tenait à mettre à terre et que trois de ses navires n’étaient pas en état de combattre. Il avait bien fallu accepter ces excuses, mais à l’avenir elles ne seront plus de mise et il lui faudra bien livrer bataille. Une escadre doit détruire l’autre : il n’y a pas d’autre alternative.


Aux yeux de la grande histoire, ces bavardages sont des vétilles ; mais ce sont souvent les vétilles qui préparent et expliquent les graves conflits et l’on sait déjà à quoi aboutirent ces premiers froissements d’amour-propre et de vanité.

Il nous faut pourtant retenir l’accusation portée contre la Bourdonnais d’avoir laissé échapper l’escadre anglaise. Il y avait dix jours à peine que les événements s’étaient produits ; les impressions étaient donc récentes. Étaient-elles plus justes ? on ne le saura jamais. Raisonner après coup sur ce qui aurait pu se faire est à la portée de tout le monde et il n’y eut pas d’enquête même officieuse sur les événements des 6 et 7 juillet. Les opinions peuvent donc se contredire sans que personne soit en droit de les départager souverainement. La Bourdonnais a justifié son inaction par des excuses légitimes : les vents étaient contre lui et en mer il faut toujours compter avec les forces indépendantes de la volonté de l’homme. Mais précisément parce qu’il en fut la victime, la Bourdonnais, mis dans l’impossibilité de détruire l’escadre anglaise, n’a pu laisser la réputation d’un grand marin et c’est le moins qu’on doive concédera ceux qui critiquent sa conduite en cette circonstance.

Ses hésitations, lorsqu’il s’agit d’attaquer Madras, le firent rétrospectivement accuser ou tout au moins soupçonner de lâcheté dans ces mêmes journées de juillet, et