Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 2.djvu/343

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vaisseaux de venir l’y rallier. « Expliquez-vous clairement avec moi, disait-il en terminant, et parlez-moi avec la même franchise. Je vous demande votre amitié et je reste et vais travailler de nouveau à la sûreté de l’Inde. » (A. C., C2 81, p. 192).

Il ne semble pas que Dupleix ait répondu directement à cette lettre ; mais, était-ce une simple coïncidence ? le jour où il la reçut (29 septembre), il envoya lui-même à la Bourdonnais une lettre confidentielle qu’il le priait de lire en particulier. Elle se référait uniquement au traité de rançon qui « l’empêchait absolument de reposer ».

« Souffrez, lui écrivait-il, que je vous dise que je ne suis point du tout votre ennemi, que je n’ai cherché qu’à vous procurer de la gloire… Que n’ai-je pas employé pour vous seconder ?… Tant de soins… pour aboutir à un traité dont l’exécution ne peut avoir lieu ni dans l’Inde ni dans l’Europe… Pas d’illusion à ce sujet… Les colonies éloignées se rançonnent à la vérité ; mais ce n’est jamais en billets, mais à beaux deniers comptant. Les souverains, les compagnies sont en droit de désapprouver ceux qui les engagent sans ordre. Ils se moquent d’autant mieux de tous ces billets, qu’ils sont encore les maîtres des places rançonnées et qu’il faudrait une nouvelle guerre pour les faire payer. « Les rois eux-mêmes ne tiennent pas leurs paroles engagées sous l’empire de la nécessité ; témoins : François Ier et le roi Jean. Que la Bourdonnais y réfléchisse. Il peut encore tout arrêter, en rejetant toute la faute sur le Conseil supérieur de Pondichéry. » Que ne donnerais-je, ajoutait Dupleix, pour être auprès de vous ! Je suis persuadé que j’aurais le don de vous persuader et de vous convaincre que je vous en parle en homme qui n’a d’autre but que votre gloire et l’intérêt de ses maîtres. Soyez persuadé de cette vérité, soyez-le de l’envie que j’ai de faire cesser mille mauvais propos. Au nom de Dieu. Monsieur, au nom de vos enfants, de votre épouse, laissez-vous persuader à ce que j’ai l’honneur de vous dire. » (Mémoire, n° 81).