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la place avec deux compagnies de cent hommes chacune, qui paraissaient suffisantes.

Le prestige acquis par Dumas dans l’affaire de Moka puis dans celle de Karikal avait déterminé divers paliagars ou petits chefs indigènes des provinces du sud à lui faire des propositions d’établissement dans le fond de la baie de Tuticorin entre Benpar et Kilicaré et le roi de Travancore lui-même était disposé à lui céder le port de Colèche.

« L’avantage qui en résulterait à la nation, écrivait Dumas à la Compagnie le 10 janvier 1740, n’est nullement douteux, en supposant que la Compagnie voulut étendre son commerce aux Indes. De l’établissement qui est en deçà du Cap Comorin, on tirerait des toiles en quantité et on y pécherait des chanques et des perles. De celui de Colèche on tire du fil de coton, des toiles, du poivre et de la grosse cannelle. »

Or les Hollandais avaient des établissements importants sur l’une et l’autre de ces côtes, où ils se considéraient comme invertis d’un monopole commercial ; Dumas était convaincu que nous avions aussi bien qu’eux le droit de nous établir sur des terres qui ne leur appartenaient pas effectivement, mais il ne se dissimulait pas que même avec le concours de Chanda Sahib nous courrions des risques de conflit. Et il ajoutait ces lignes, qu’on ne saurait lire avec trop d’attention, tellement elles éclairent d’un jour lumineux et la politique de la Compagnie et celle de ses gouverneurs :

« Que je paierais bien cher un mot d’ordre de votre Grandeur dans la situation où je suis ; je ne trouve pas la moindre lumière dans tout ce qui a été écrit jusqu’à présent aux Indes, qui puisse m’éclaircir pour me conduire dans une affaire aussi délicate. Je crains d’un côté de m’engager dans des démarches et dépenses qui n’étant pas soutenues deviendraient inutiles,