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tout soupçon de connivence avec les Anglais. Et c’est là le grand problème moral de cette histoire.

Dans les conférences qui précédèrent la reddition de Madras, la Bourdonnais causa seul à seul avec les Anglais. La prudence eût exigé qu’il consultât son entourage ou se fit assister de témoins. Aussi Les soupçons d’intelligence avec l’ennemi naquirent-ils spontanément ; pourquoi tant de mystère si ce n’est pour couvrir des machinations ténébreuses ? Les égards qu’il eut ensuite pour les vaincus ne furent pas de nature à dissiper l’équivoque. La malveillance s’accrut lorsqu’on apprit le 26 la conclusion d’une entente avec Morse. Sur quelles bases s’était-elle faite ? Nul ne le savait ; elle avait continué d’être négociée dans l’ombre. Et les bruits commencèrent à se répandre que la Bourdonnais avait reçu quelque avantage personnel intéressant. Par une malheureuse coïncidence, les Anglais qui jusque-là ne cessaient de l’attaquer changèrent tout à coup d’attitude et d’allure : « Ils paraissaient trop contents de cette opération, écrivait d’Espréménil le 1er octobre, pour qu’il n’y eût pus quelque chose que je présume. » (A. C, C2 81, p. 157).

Les opinions de d’Espréménil sont en général trop partiales pour être accueillies aveuglément. Il en est de même de celles que Friell exprimait le lendemain dans une longue lettre à Dupleix : « Ce qu’il y a de vrai, disait-il, c’est qu’il ne peut avoir rendu une capture aussi considérable pour des espérances incertaines sans avoir bien fait ses affaires particulières. » Il aurait, nous conte-t-il ensuite, remis aux habitants à titre de présent pour 200.000 pagodes de meubles, bijoux et argenterie.