Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 2.djvu/409

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

c’était à eux de voir s’ils pouvaient les enfreindre. (Mémoire, n° 204).

La Bourdonnais était toujours d’avis d’envoyer la flotte à la côte Malabar plutôt qu’à Achem ; à la côte Malabar, où il pouvait encore la conduire, il se flattait de tenter et de réussir quelque entreprise avantageuse à la Compagnie ; mais devant la réponse de Dupleix qui lui retirait en quelque sorte le droit de disposer de l’escadre, ses dernières espérances s’évanouirent et il se sentit impuissant à réagir ; peut-être aussi restait-il impressionné par ces fameux ordres de la Compagnie du 6 octobre 1745, que dans son for intérieur il contestait. Quoi qu’il en soit, il assembla ses capitaines pour leur exposer la situation ; il le fit en ces termes, qui expliquent tout :

« Je ne saurais disconvenir de la force de vos raisons touchant l’escadre anglaise ; mais je ne puis en même temps vous ordonner de ne pas exécuter ce que le Conseil supérieur a décidé, par la crainte de prendre le mauvais parti. » (Mémoire, n° 208).

Voici quelle fut la réponse des capitaines :

« Nous croyons que le parti le plus sûr est de tâcher d’aller tous à Achem pour y remâter l’Achille, si ce vaisseau peut le gagner, sinon d’aller avec notre commandant aux îles ou à la côte Malabar ; malgré notre sentiment, M. de la Bourdonnais étant porteur d’ordres du roi, nous sommes prêts d’exécuter ce qu’il nous ordonnera. » (Mémoire, n° 208).

Ainsi la responsabilité de la décision suprême incombait à la Bourdonnais, resté seul chef de l’escadre aux yeux de ses marins. Il prit aussitôt son parti et communiqua ses décisions à Dupleix en le priant de garder le secret. Il serait trop long d’énumérer les diverses éventualités qu’il envisagea et qui toutes étaient justifiées par les