Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 2.djvu/89

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dans l’Inde, on devrait au contraire désirer qu’ils fussent tous dans un certain état d’opulence qui, en même temps qu’il soutiendrait le crédit de la nation en général, servirait à trouver des ressources pour la Compagnie dans des temps aussi critiques que celui ou nous nous trouvons. »

Ces sentiments sont ceux d’un chef humain et clairvoyant ; ils corrigent d’une façon heureuse l’incontestable vanité qui se dégage parfois de ses actes ou de ses écrits, et sont d’autant plus méritoires que Dupleix se faisait peu d’illusions sur la valeur de son personnel.

« Le défaut général de vos employés, écrivait-il à la Compagnie le 30 janvier 1750, est de ne s’appliquer à rien et de ne venir aux bureaux que comme gens condamnés à une servitude que la plupart regardent fort au-dessous d’eux. Le passage de la ligne fait un effet surprenant sur la plupart et tel qui n’était que d’un métier très mécanique en Europe devient après ce passage un homme d’importance. Cette idée dont ils ont trouvé le secret de se persuader eux-mêmes et qu’ils tâchent d’insinuer aux autres les infatue au point que l’on ne peut tirer d’eux que de très mauvais services et toujours avec peine. Et si quelques-uns se distinguent par leur application, les autres les tournent en ridicule. Ceci est général pour les employés subalternes.

« La plupart des conseillers ont agi à peu près de même lorsqu’ils étaient subalternes et l’application leur ayant manqué comme aux autres, il y en a peu qui aient les connaissances et une certaine étendue de vues et d’idées, absolument nécessaires au commandement des principaux comptoirs. Ils s’acquittent des détails qu’on leur donne et qui sont toujours assez bornés : caissier, garde du trésor, garde magasin, etc. Tout cela s’exerce bien et je puis dire avec probité pour tout ce qui est sous mes yeux[1]. »

  1. B. N. 9151, p. 16.