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Page:Massé - Mena’sen, 1922.djvu/25

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III


Philippe Maugras, capitaine de milice, passait pour un des habitants les plus aisés de Saint-François-des-Prés et peut-être même de toute la Citière. Sa terre, toutes redevances payées, lui rapportait, bon an mal an, de deux à trois cents livres à part ce qu’il tirait de la chasse et de la pêche qu’il pratiquait beaucoup durant la morte-saison.

Quand nous aurons ajouté qu’il possédait en propre deux chevaux, trois bêtes à cornes, voitures et traîneaux et trois fusils, on se convaincra qu’il devait être un notable, à une époque où il fallait être riche ou renforcé, comme on disait alors, pour garder un cheval. Du reste, pour s’en convaincre, il suffisait de remarquer le salut prononcé dont le gratifiait le seigneur Crevier. On ne traite pas aussi honnestement le dernier censitaire de sa seigneurie. Maugras jouissait aussi de la distinction peu banale de savoir lire et écrire.

Cette opulence relative n’était cependant pas pour monter la tête à Maugras. Sans doute, il y a plus de raison de tirer vanité de l’aisance que l’on doit à son travail et à son industrie que de la fortune dont on hérite, mais, démocrate avant le mot, Maugras avait puisé, dans le commerce de l’homme des bois et dans la vie aventureuse qu’il avait menée jusque là de colon et de milicien, un esprit d’égalité qui fait frères tous les hommes de bonne volonté.

Aussi, le lecteur ne sera pas surpris de le trouver, un matin de janvier 1704, travaillant d’arrache-pied en compagnie de Paulin Vadnais, le frère de sa femme, espèce de garçon de ferme qui