Page:Maupassant - Boule de suif.djvu/120

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pour voir s’il la rencontrerait encore une fois. Il la rencontra et il lui jeta un coup d’œil enflammé, un coup d’œil qui disait :

— Me voilà.

Mais comment lui parler ?

Il revint une cinquième fois, et comme il la voyait de nouveau arriver en face de lui, elle laissa tomber son ombrelle.

Il s’élança, la ramassa, et, la présentant :

— Permettez, madame…

Elle répondit :

— Aôh, vos êtes fort gracious.

Et ils se regardèrent. Ils ne savaient plus que dire. Elle avait rougi.

Alors, s’enhardissant, il prononça :

— En voilà un beau temps.

Elle murmura :

— Aôh, délicious !

Et ils restèrent encore en face l’un de l’autre, embarrassés, et ne songeant d’ailleurs à s’en aller ni l’un ni l’autre. Ce fut elle qui eut l’audace de demander.

— Vos été pour longtemps dans cette pays.

Il répondit en souriant :

— Oh ! oui, tant que je voudrai !

Puis, brusquement, il proposa :

— Voulez-vous venir jusqu’à la jetée ? c’est si joli par ces jours-là !

Elle dit simplement :

— Je volé bien.

Et ils s’en allèrent côte à côte, elle de son allure sèche