Page:Maupassant - Boule de suif.djvu/145

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Mais soudain elle bondit, effarée. Un cri furieux faisait trembler la maison :

— Adélaïde ?

Elle ouvrit sa porte et répondit de son grenier :

— Me v’là, not’ maître.

— Ousque t’es ?

— Mais j’suis dans mon lit, donc, not’ maître.

Alors il vociféra :

— Veux-tu bien descendre, nom de D… J’aime pas coucher tout seul, nom de D…, et si tu n’veux point, tu vas me foutre le camp, nom de D…

Alors, elle répondit d’en haut, éperdue, cherchant sa chandelle :

— Me v’là, not’ maître !

Et il entendit ses petits sabots découverts battre le sapin de l’escalier ; et, quand elle fut arrivée aux dernières marches, il la prit par le bras, et dès qu’elle eut laissé devant la porte ses étroites chaussures de bois à côté des grosses galoches du maître, il la poussa dans sa chambre en grognant :

— Plus vite que ça, donc, nom de D… !

Et elle répétait sans cesse, ne sachant plus ce qu’elle disait :

— Me v’là, me v’là, not’ maître.


Six mois après, comme elle allait voir ses parents, un dimanche, son père l’examina curieusement, puis demanda :

— T’es-ti point grosse ?