Page:Maupassant - Le Horla, OC, Conard, 1909.djvu/273

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

champs, les routes, les blés et les bois. Elle passe, elle passe, nous précédant d’un demi-kilomètre ; et j’écoute à présent, penché hors de la nacelle, le grand bruit du vent dans les arbres et sur les récoltes.

Je dis au capitaine Jovis : « Comme ça souffle ! »

Il me répond : « Non, ce sont des chutes d’eau sans doute. » J’insiste, sûr de mon oreille qui reconnaît bien, le vent, pour l’avoir entendu si souvent siffler dans les cordages. Alors Jovis me pousse le coude ; il a peur d’émouvoir ses passagers joyeux et tranquilles, car il sait bien qu’un orage nous chasse. Un homme enfin nous a compris, il répond : « Nord. »

Un autre nous jette le même mot.

Et soudain une ville considérable, d’après l’étendue de son gaz, se montre juste devant nous. C’est Lille, peut-être. Comme nous approchons d’elle, apparaît sous nous, tout à coup, une si surprenante lave de feu, que je me crois emporté sur un pays fabuleux où on fabrique des pierres précieuses pour les géants.

C’est une briqueterie, paraît-il. En voici d’autres, deux, trois. Les matières en fusion bouillonnent, scintillent, jettent des éclats bleus, rouges, jaunes, verts, des reflets de