Page:Maupassant - Le Rosier de Madame Husson.djvu/158

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

dégoût de la bassesse, par un sentiment de dignité personnelle et d’orgueil ; mais nous n’en portons pas au fond du cœur la foi aveugle, innée, brutale, comme cet homme.

« Laissez-moi vous raconter sa vie.

« Il fut élevé, comme on élevait autrefois les enfants, en faisant deux parts de tous les actes humains : ce qui est bien et ce qui est mal. On lui montra le bien avec une autorité irrésistible qui le lui fit distinguer du mal, comme on distingue le jour de la nuit. Son père n’appartenait pas à la race des esprits supérieurs qui, regardant de très haut, voient les sources des croyances et reconnaissent les nécessités sociales d’où sont nées ces distinctions.

« Il grandit donc, religieux et confiant, enthousiaste et borné.

« À vingt-deux ans il se maria. On lui fit épouser une cousine, élevée comme lui, simple comme lui, pure comme lui. Il eut cette chance inestimable d’avoir pour compagne une honnête femme au cœur droit, c’est-à-dire ce qu’il y a de