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l’héritage

« Cora, écoute, Cora, j’ai eu tort, écoute. » Elle semblait morte. Alors il essaya de soulever cette main. Elle se détacha facilement, et il vit un œil ouvert qui le regardait, un œil fixe, inquiétant et troublant.

Il reprit : « Écoute, Cora, je me suis laissé emporter par la colère. C’est ton père qui m’avait poussé à bout. On n’insulte pas un homme ainsi. »

Elle ne répondit rien, comme si elle n’entendait pas. Il ne savait que dire, que faire. Il l’embrassa près de l’oreille, et, en se relevant, il vit une larme au coin de l’œil, une grosse larme qui se détacha et roula vivement sur la joue ; et la paupière s’agitait, se fermait coup sur coup.

Il fut saisi de chagrin, pénétré d’émotion, et, ouvrant les bras, il s’étendit sur sa femme ; il écarta l’autre main avec ses lèvres, et lui baisant toute la figure, il la priait : « Ma pauvre Cora, pardonne-moi, dis, pardonne-moi. »

Elle pleurait toujours, sans bruit, sans sanglots, comme on pleure des chagrins profonds.

Il la tenait serrée contre lui, la caressant, lui murmurant dans l’oreille tous les mots tendres qu’il pouvait trouver. Mais elle demeurait insensible. Cependant elle cessa de pleurer. Ils restèrent longtemps ainsi, étendus et enlacés.

La nuit venait, emplissant d’ombre la petite