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regret

Et il avait répondu :

— Ce n’est pas que je sois fatigué ; mais Sandres est peut-être réveillé maintenant.

Et elle avait dit, en haussant les épaules :

— Si vous craignez que mon mari soit réveillé, c’est autre chose ; retournons !

En revenant, elle demeura silencieuse : et elle ne s’appuyait plus sur son bras. Pourquoi ?

Ce « pourquoi » là, il ne se l’était point encore posé. Maintenant il lui semblait apercevoir quelque chose qu’il n’avait jamais compris.

Est-ce que ?…

M. Saval se sentit rougir, et il se leva bouleversé comme si, de trente ans plus jeune, il avait entendu Mme Sandres lui dire : « Je vous aime ! »

Était-ce possible ? Ce soupçon qui venait de lui entrer dans l’âme le torturait ! Était-ce possible qu’il n’eût pas vu, pas deviné ?

Oh ! si cela était vrai, s’il avait passé contre ce bonheur sans le saisir !

Il se dit : Je veux savoir. Je ne peux rester dans ce doute. Je veux savoir ?

Et il s’habilla vite, se vêtant à la hâte. Il pensait : « J’ai soixante-deux ans, elle en a cinquante-huit ; je peux bien lui demander cela. »

Et il sortit.

La maison de Sandres se trouvait de l’autre