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YVETTE.

Jamais. La maison de la mère est une maison publique dont la fille attire la clientèle. On n’épouse pas dans ces conditions-là.

Dans la bourgeoisie ? Encore moins. Et d’ailleurs la marquise n’est pas femme à faire de mauvaises opérations ; elle ne donnerait définitivement Yvette qu’à un homme de grande position, qu’elle ne découvrira pas.

Dans le peuple, alors ? Encore moins. Donc, pas d’issue. Cette demoiselle-là n’est ni du monde, ni de la bourgeoisie, ni du peuple, elle ne peut entrer par une union dans aucune de ces classes de la société.

Elle appartient par sa mère, par sa naissance, par son éducation, par son hérédité, par ses manières, par ses habitudes, à la prostitution dorée.

Elle ne peut lui échapper, à moins de se faire religieuse, ce qui n’est guère probable, étant donnés ses manières et ses goûts. Elle n’a donc qu’une profession possible : l’amour. Elle y viendra, à moins qu’elle ne l’exerce déjà. Elle ne saurait fuir sa destinée. De jeune fille elle deviendra fille, tout simplement. Et je voudrais bien être le pivot de cette transformation.

J’attends. Les amateurs sont nombreux. Tu