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Page:Maurault - Histoire des Abénakis depuis 1605 jusqu'à nos jours, 1866.djvu/31

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des abénakis

une espèce de communauté, où souvent les biens étaient communs. C’est pour cette raison que dix à douze familles pouvaient vivre en paix réunies dans une même loge.

Ils étaient hospitaliers et généreux envers l’étranger, qui se présentait chez eux en qualité d’ami ; souvent, ils lui offraient ce qu’ils avaient de plus précieux. Mais ils se montraient implacables à l’égard de leurs ennemis ou de ceux qui avaient offensé leur nation. Ils ne manifestaient jamais leur mécontentement ou leur haine par des jurements ou des blasphèmes[1], mais ils conservaient dans leurs cœurs leurs ressentiments et leurs projets de vengeance, jusqu’à ce qu’ils rencontrassent une occasion favorable pour se venger. Rien ne pouvait les engager à renoncer à ces projets de vengeance. Les plus longues distances n’y mettaient aucun obstacle. Ils franchissaient, avec une étonnante rapidité, d’épaisses et interminables forêts, souffrant la faim, la soif, et supportant courageusement les grandes fatigues de ces pénibles voyages, pour aller, par des routes détournées ou inconnues, surprendre leur ennemi, tomber sur lui à l’improviste et le faire prisonnier, afin de jouir du suprême plaisir de se venger en lui faisant souffrir les tourments les plus cruels et les plus barbares. Une longue suite d’années ne suffisait pas pour apaiser leur haine. Si un sauvage ne rencontrait pas pendant sa vie l’occasion de se ven-

  1. L’on remarque encore aujourd’hui la même chose chez les Abénakis. Ils ont la plus grande horreur des jurements et des blasphèmes. Il n’y a pas de mots dans leur langue pour exprimer ceux qui sont si souvent prononcés par les Canadiens.