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Page:Maurault - Histoire des Abénakis depuis 1605 jusqu'à nos jours, 1866.djvu/32

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histoire

ger, il transmettait comme un héritage sa haine à ses enfants, avec injonction de le venger un jour. Cette haine passait de générations en générations jusqu’à ample satisfaction.

Ils étaient très-sensibles à l’amitié et poussaient même ce sentiment jusqu’au ridicule. Chacun, à l’âge de faire la chasse et de combattre l’ennemi, se choisissait un ami, à peu près de son âge, qu’il appelait « Nidôba »[1], mon camarade. Ces deux sauvages s’unissaient intimement par un engagement mutuel, promettant de braver tout danger pour s’assister et se supporter l’un et l’autre. Ils demeuraient amis intimes jusqu’à la mort. Cette amitié était poussée si loin qu’elle chassait même la crainte de la mort, que ces deux amis ne considéraient que comme une séparation temporaire, étant persuadés qu’ils seraient réunis dans l’autre vie, pour ne plus être séparés.

Ces sauvages croyaient en l’immortalité de l’âme. Ils pensaient qu’après la mort l’âme était transportée, vers le Sud, dans une région inconnue, mais fort agréable ; qu’elle y était heureuse pour toujours ; que ce bonheur consistait en la jouissance non-interrompue de toutes sortes d’amusements, comme la chasse, la pêche, la danse et autres choses semblables. Ils croyaient que les méchants étaient envoyés dans une région, très-éloignée, où ils étaient malheureux pour toujours.

Ils se montraient absolument indifférents aux pro-

  1. Les Abénakis sont encore très-sensibles à l’amitié ; ils ont conservé l’expression « Nidôba », qui signifie une grande intimité. La signification littérale de ce mot est : « deux qui vont ensemble. »