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des abénakis.

les ouvrages des sauvages. Il lui témoignait toujours la plus grande affection.

Si parfois le souvenir de ses parents et de son pays rendait le jeune Anglais triste et mélancolique, le sauvage partageait sa douleur.

L’année suivante, le vieux guerrier fut encore appelé à prendre les armes contre les Anglais. Il partit pour la guerre avec son protégé. Avant d’arriver au lieu du combat, il s’arrêta et lui dit : « Tu sais où nous allons. Nous allons vers tes frères, qui veulent combattre contre nous. Écoute ce que j’ai à te dire. Je t’ai sauvé la vie. Je t’ai appris à faire des canots et bien des choses nécessaires à l’homme. Je t’ai enseigné la manière de faire la chasse. Qu’étais tu lorsque je t’ai emmené dans mon wiguam ? Tes mains étaient comme celles d’un enfant ; elles n’étaient capables, ni de gagner ta vie, ni de la défendre. Tu étais complètement ignorant. Tu as appris de moi toutes choses. Serais-tu assez ingrat pour lever ton bras contre un sauvage ?

Le jeune homme déclara qu’il aimerait mieux mourir que de verser le sang de ses amis et protecteurs. Alors, le sauvage pencha la tête, mit sa figure entre ses mains et réfléchit quelque temps ; puis, il reprit : « As-tu un père ? » — « Mon père vivait », dit le jeune Anglais, « lorsque je laissai mon pays natal ». — « Ah ! que ton père est heureux d’avoir encore un fils ! » s’écria le sauvage, Et après quelques moments de silence, il ajouta : « Moi aussi j’ai été père, mais je ne le suis plus. J’ai vu mon fils tomber dans un combat ; il se battit bravement à mes côtés, tomba criblé de