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Page:Maurault - Histoire des Abénakis depuis 1605 jusqu'à nos jours, 1866.djvu/401

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des abénakis

religion, et je leur ai reproché que leur religion n’était pas une vraie religion, que c’était une multitude de religions, que la plupart d’eux vivaient comme des gens qui n’en ont point, leur ajoutant que je les connaissais, ayant été dans ma jeunesse presque toujours chez eux. À l’égard du culte des Saints, surtout de la Sainte-Vierge, je lui montrai que Dieu lui fait entendre nos prières et qu’elle les écoute. Vous me connaissiez, leur ai-je ajouté, j’ai été un des plus grands ivrognes qui fut jamais. Dieu a eu pitié de moi, je ne le suis plus depuis bien des années, et je défie quiconque, depuis ma conversion, de me pouvoir reprocher d’avoir goûté vin ou eau-de-vie. À qui en suis-je redevable ? À ma Sainte-Dame la Mère de Jésus. Ce fut à elle que je m’adressai dans l’extrême faiblesse où je me sentais pour vaincre une habitude invétérée d’ivrognerie ; je l’ai cependant vaincue avec son secours, et après cela dites ce que vous voudrez, vous autres Anglais, que les Saints ne nous entendent pas, qu’il est inutile de nous adresser à eux et à la Mère de Dieu, je ne vous crois pas. Vous êtes des menteurs ; mon expérience me l’apprend. Sachez que j’aimerai et bénirai la Sainte-Vierge jusqu’au dernier soupir de ma vie. Je suis sûr même qu’elle me sait bon gré et qu’elle me récompensera de ce que je la défends contre vous »[1].

On eût dit que ce bon Chef, en racontant au Père cette entrevue, se croyait encore aux prises avec les

  1. Relation du P. Vincent Bigot. 1701. 8, 10.