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Page:Maurault - Histoire des Abénakis depuis 1605 jusqu'à nos jours, 1866.djvu/46

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histoire

jongleurs qu’ils n’entreprenaient jamais une chose de quelqu’importance sans les consulter.

Chaque sauvage recevait d’eux certains objets, qui étaient appelés « Madaôdos ». Ces objets étaient des petites pierres, ou des os, ou des morceaux de certains bois, ou autres choses semblables. Les sauvages conservaient ces objets dans des sacs, et les considéraient comme un grand préservatif contre les attaques des Esprits du Mal. Plusieurs conservaient un grand nombre de ces « Madaôdos »[1].

La jonglerie solennelle était une chose qui inspirait de l’horreur. Elle se faisait dans les circonstances importantes, comme à la veille d’une guerre, pour en connaître d’avance le résultat. Voici comment se faisait cette jonglerie. Le jongleur s’enfermait seul dans une petite cabane, faite ordinairement d’écorces de bouleau. Alors, il évoquait hautement l’Esprit du Mal. Il passait quelquefois plusieurs heures dans cette cabane à se débattre et à crier comme un démon. Les sauvages se tenaient à une certaine distance de la loge aux sortiléges, attendant avec une grande anxiété la prophétie favorable ou défavorable. Lorsque le jongleur en était rendu à un tel état d’épuisement qu’il ne pouvait plus crier, il sortait de sa loge, le corps tout ruisselant de sueurs, et annonçait le résultat de son sortilége. Sa parole était alors reçue comme venant du ciel.

  1. Les Abénakis ont conservé dans leur langue le mot « Madaôdo » ; mais, comme ils n’ont maintenant aucune croyance aux ridicules superstitions de la jonglerie, ils ne donnent pas à ce mot la même signification qu’autrefois, Aujourd’hui « Madaôdo » veut dire « Démon ».