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Page:Maurault - Histoire des Abénakis depuis 1605 jusqu'à nos jours, 1866.djvu/528

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histoire

ter derrière un coteau, pour empaqueter le butin qu’ils venaient de faire. Deux sauvages se saisirent de Madame Johnson et la placèrent dans les broussailles, d’une manière un peu rude ; elle y perdit l’un de ses souliers, ce qui fut pour elle la cause de grandes souffrances.

Pendant ce temps, un nommé Osmer, qui avait aussi passé la nuit chez Johnson et qui n’avait pas été fait prisonnier parcequ’à l’arrivée des sauvages il s’était caché dans un coffre dans le haut de la maison, se rendit promptement au fort pour y annoncer cette triste nouvelle. Un parti fut immédiatement organisé pour aller à la poursuite des sauvages et délivrer les captifs ; mais M. Willard, père de Madame Johnson, commandant alors au fort, s’opposa fortement à ce projet, alléguant que la coutume invariable des sauvages était de tuer leurs prisonniers lorsqu’ils étaient attaqués[1]. Ce projet fut donc abandonné.

Les sauvages s’apercevant bientôt, par les coups de fusils qu’ils entendaient du côté du fort, que l’alarme y avait été donnée, et craignant qu’un détachement de troupes ne fut envoyé pour délivrer les prisonniers, précipitèrent leur fuite au pas de course ; entraînant leurs malheureuses victimes dans cette marche forcée. Ils s’enfuirent ainsi environ trois milles. Les prison-

  1. L’opinion de Willard était fausse et erronée, car les Abénakis n’ont jamais eu la coutume de tuer leurs prisonniers, lorsqu’ils étaient attaqués. Ils se défendaient courageusement pour repousser l’ennemi, et, loin de tuer leurs captifs, ils tenaient beaucoup à leur conserver la vie ; il se faisaient une gloire de les emmener vivants en Canada. Si parfois ils en tuaient quelques uns, c’était, ou parceque ces captifs, par cause de maladie ou quelqu’infirmité, ne pouvaient les suivre dans le voyage, ou parcequ’ils avaient commis quelque faute, qui, à leurs yeux, méritait la mort.