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Page:Maurault - Histoire des Abénakis depuis 1605 jusqu'à nos jours, 1866.djvu/557

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des abénakis.

causait beaucoup de mal. La nostalgie, cruelle maladie, qui ne se guérit ordinairement que par le retour au pays, étouffait presque les sentiments de gratitude qu’elle éprouvait pour ses bienfaiteurs.

Les autres prisonniers étaient sans cesse tourmentés par les plus vives inquiétudes, et ignoraient complètement leur sort futur. Peut-être les laisserait-on dans le village pour y mener cette vie entièrement inactive, qui les rendait doublement malheureux ; peut-être les entraînerait-on dans quelques excursions contre leurs compatriotes, ou vers les froids lacs du Nord pour y faire la chasse. Ces sombres pensées étaient bien loin de les rassurer sur leur avenir. Ils avaient la liberté de se visiter, suivant leurs désirs, et ils en profitaient pour passer ensemble de longues heures à faire des conjectures sur leur future destinée. Ces entretiens soulageaient un peu leurs cœurs affligés.

Mais ils devaient être bientôt privés de cette légère consolation. Johnson ne resta que quelques jours à Saint-François. Son maître, connaissant qu’il n’en retirerait aucun profit, ni à la chasse, ni dans les voyages, le conduisit à Montréal et le vendit. Marie-Anne Willard, Labarre et les deux petites filles, Suzanne et Polly, furent aussi vendus dans la même ville, peu de temps après. Farnsworth fut emmené plusieurs fois à la chasse par son maître, mais, comme il était plus nuisible qu’utile dans ces voyages, il fut aussi vendu à Montréal. Il ne restait donc plus à Saint-François que Madame Johnson, son fils Silvanus et son dernier enfant.