Page:Maurice Joly - Recherches sur l'art de parvenir - Amyot éditeur - 1868.djvu/61

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Ce serait cependant un très mauvais calcul ; car il est avéré que les petites qualités sont infiniment plus utiles que les grandes et que les grands talents sont loin de valoir les petits. Échangez donc beaucoup de savoir contre un peu d’habileté, beaucoup d’esprit contre un peu de sens commun, beaucoup de profondeur contre un peu de surface, quelques avantages extérieurs contre n’importe quoi. Avec quoi attire-t-on la foule sinon par de petits moyens et des artifices grossiers ? Que faut-il pour s’enrichir ? un peu d’ordre ; pour être protégé ? un peu de souplesse ; pour avoir des amis ? un peu de gaieté ; pour agréer aux femmes ? un certain genre ; pas plus.

Le charlatanisme est la moitié du savoir-faire.

DES ESPRITS BORNÉS ET DE CE QU’ON APPELLE LES SOTS.

Règle générale, ce qui manque à l’esprit ou à l’imagination profite au caractère et à l’entente de la vie pratique. Ce n’est donc pas seulement une condition de bonheur que d’avoir l’esprit borné, c’est une condition de succès ; les gens qui ont peu d’idées sont moins sujet à l’erreur, et suivent de plus près ce qu’ils font.

Il est très porté, surtout en France, de parler avec dédain de ce qu’on appelle les sots ! C’est une locution tout à fait insupportable ; les sots sont des gens