Page:Maurice Joly - Recherches sur l'art de parvenir - Amyot éditeur - 1868.djvu/62

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qui réussissent, qui parviennent, qui s’enrichissent, qui sont bien appointés, bien établis, des gens en place, des gens titrés, nouvellement décorés, des députés, des gens de lettres en renom, des académiciens, des journalistes. Peut-on jamais être un sot quand on fait si bien ses affaires ? Évidemment non.

DE LA MÉDIOCRITÉ EN GÉNÉRAL.

Une femme au-dessus du commun, dont la destinée fut tragique[1], résumait ainsi les impressions que lui avait fait éprouver la vue des hommes de son temps :

« La chose qui m’a le plus surpris depuis que l’élévation de mon mari m’a donné le moyen de connaître beaucoup de personnes, et particulièrement celles employées dans les grandes affaires, c’est l’universelle médiocrité, elle passe tout ce que l’imagination peut se représenter, et cela dans tous les degrés, depuis le commis jusqu’au ministre, au général et à l’ambassadeur ; jamais, sans cette expérience, je n’aurais cru mon espèce si pauvre. »

Si le jugement est vrai pour les hommes d’une époque qui passe pour avoir été féconde en organisations, on laisse à juger ce qu’il en peut être dans les temps qui ont suivi.

On est porté à croire que les grandes positions tiennent à de grands talents, comme on rapporte les

  1. Mme Roland.