Page:Mechnikoff - La civilisation et les grands fleuves historiques.djvu/253

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varier. Certes, sauf pour un nombre assez restreint de cas particuliers mentionnés déjà, on peut faire abstraction des changements géologiques et climatiques, lents et comptant pour peu dans les annales de l’humanité ; par contre, les modifications que l’industrie humaine, le travail accumulé des générations successives produisent dans la nature d’un pays ont une fort grande importance, et l’école déterministe ne saurait les ignorer sans mentir à son principe fondamental. Ainsi, les colonisateurs préhistoriques de la vallée du Nil léguèrent à leurs descendants de l’époque memphite un milieu ambiant très différent de celui que, plus ou moins directement, ils avaient eux-mêmes reçu des mains de la nature : plus tard, d’importants travaux, la création, par exemple, du grand réservoir de Fayoum, modifièrent considérablement les conditions physiques qu’avaient dû accepter les Égyptiens des dynasties thébaines. Et combien plus variable encore l’aptitude des hommes eux-mêmes, ou plutôt celles des générations consécutives, à la coordination volontaire du travail collectif imposé par le milieu ! Héritier des habitudes de labeur et de sociabilité péniblement acquises par ses ancêtres, familiarisé par un long usage avec l’utilité de certains ouvrages dont ses prédécesseurs n’auraient su ni concevoir ni comprendre les plans compliqués, ayant acheté par nombre d’expériences une notion plus consciente des liens qui le rattachent à la patrie ou à la communauté, l’individu des âges postérieurs porte de