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L’INDUS ET LA GANGE

nautés franches du centre de l’Afrique ; au contraire, l’Inde brahmanique, que nous voyons étouffer dans le cadre des castes, eut la gloire de devancer toutes les autres grandes despoties fluviales, et d’accomplir jusqu’au bout la mission des civilisations primaires. Sa part de labeurs, sa tâche particulière ne fut point, purement et simplement, la constitution des castes : autrement large est son œuvre ; seule dans les temps antiques, nous le savons déjà, l’Inde est parvenue à réaliser un ordre social réglé par son mécanisme intérieur, indépendant d’un pouvoir coercitif personnel et arbitraire. Pour résoudre ce grand problème de l’histoire universelle, elle exagéra jusqu’à l’absurde, jusqu’à l’inique, ces distinctions de classes qui se produisent partout, et qui, là comme ailleurs, sont dues à un ensemble très complexe de causes ethnologiques, sociales et politiques[1].

Si l’on attribue la constitution brahmanique à l’influence des populations autochtones ou immigrées depuis la plus haute antiquité dans l’Hindoustan, on ramène à presque rien l’importance historique de ces Aryas orientaux qu’on s’est plu cependant à nous présenter comme la race privilégiée de l’histoire. Rien n’est d’ailleurs plus arbitraire que d’appliquer aux termes Arya et Dacyou des hymnes

  1. Cf. Ém. Burnouf, Essai sur le Véda ; A. Maury, la Terre et l’Homme ; de Quatrefages, Matériaux pour servir à l’histoire de l’Homme, cinquième année, p. 357 à 369. — Cf. sur les castes la belle page de Max Müller dans ses Essais.