Page:Mechnikoff - La civilisation et les grands fleuves historiques.djvu/39

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Au contraire : c’est seulement depuis « l’époque darwinienne » et l’examen approfondi de la notion du progrès par les naturalistes, que ce mot a acquis un sens précis, indépendant des systèmes métaphysiques et du verbiage d’école. Dans le domaine des sciences exactes, on entend par progrès cette sériation des phénomènes naturels où, à chaque étape de l’évolution, la force se manifeste avec une variété et une intensité croissantes ; la série est dite progressive quand chacun de ses termes reproduit les antécédents, plus quelque caractère nouveau qui n’apparaissait point encore dans la phase antérieure, et devient lui-même le germe d’un plus dans la phase consécutive. La plante est en progrès sur le monde minéral : elle nous présente le processus de la nature non organisée, plus les propriétés spécifiques de la nutrition, de la croissance, de la reproduction. L’animal, à son tour, est en progrès sur la vie végétale, puisque, aux acquisitions de la plante, il ajoute ses propres facultés de mouvement et de sensation. L’homme est en progrès sur les autres vertébrés, car sa vie sensitive et intellectuelle est susceptible d’une richesse inconnue à ses précurseurs. Et, pour répondre à ce qui semble embarrasser M. F. Bouillier, la solidification de l’enveloppe terrestre, abstraction faite de l’apparition subséquente de l’homme, constitue en elle-même un progrès, puisqu’elle provoque ainsi une intensité de vie incompatible avec l’état liquide et gazeux de la planète.