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LES DOCTRINES CHIMIQUES EN FRANCE

parle et traite de l’Esprit Universel qui est dépouillé de toute corporéité et dont tous les corps dépendent. Pour s’exprimer correctement, observe Lefèvre, il faut spécifier « que la chimie a pour objet toutes les choses naturelles que Dieu a tirées du chaos par la création », que ces choses soient corporelles ou qu’elles soient privées de tout corps. Seules les choses surnaturelles sont, par essence, en dehors de sa compétence !

Le domaine de la philosophie chimique est donc très vaste puisqu’il renferme toute la Nature ? Par quels procédés le savant s’en rendra-t-il maître ? Quels moyens emploiera-t-il pour pénétrer les propriétés des choses qu’il a pour mission de connaître ? À ce problème méthodologique, Lefèvre répond que les physiciens se sont engagés sur deux voies pour atteindre la réalité ; une de ces voies aboutit a une impasse : c’est la philosophie spéculative, ou exercice absolument libre de la faculté de raisonner ; mais, sur cette route, les chimistes ont été vite arrêtés ; la pensée livrée à elle-même ne découvre aucun terrain stable sur lequel elle puisse, avec assurance, bâtir l’édifice solide de la science. En raisonnant à perte de vue, sans faire appel à l’expérience, notre esprit aboutit à des contradictions insolubles que la logique ne peut détruire. « Si vous demandez au physicien de spéculation de quoi un corps est composé, il vous répondra que cela n’est pas encore déterminé dans l’école ; que s’il est corps, il a de la quantité, et que par conséquent il