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ARI

prince s’en étant emparé, en enleva 300,000 hommes, il emmena pour peupler Tigranocertes qu’il venait de fonder, et il rendit le pays au fils de Mithridate. Ce fut l’occasion d’une nouvelle guerre, qui finit par la mort de Mithridate, et Pompée rétablit Ariobarzane sur le trône : mais ce prince, déjà très-âgé, et fatigué du poids d’une couronne qui lui avait occasionné tant de tourments, voulut la céder à Ariobarzane, fils qu’il avait eu d’Athénaïs, son épouse. Ce jeune prince ne voulut pas l’accepter, et il s’engagea un combat entre l’amour paternel et l’amour filial, auquel Pompée mit fin en décidant le fils a monter sur le trône. C-r.


ARIOBARZANE II, surnommé Philopator, fils du précédent, devint roi par l’abdication de son père, vers l’an 67 avant J.-C., et sa conduite à cette occasion lui fit donner le surnom de Philopator. On voit, par une inscription trouvée à Athènes, qu’il entreprit de faire rebâtir l’odéon de cette ville, qui avait été brûlé par Sylla. Sa femme se nommait Athénaïs, ainsi que sa mère, ce qui pourrait faire conjecturer qu’il avait épousé sa sœur, comme c’était l’usage parmi les rois de l’Asie. Il en eut deux fils, Ariobarzane et Ariarathe. Cicéron, dans ses Lettres familières, liv. 15, ép. 2, nous apprend qu’il fut victime d’une conjuration, mais on en ignore les détails. Il mourut vers l’an 52 avant J.-C. C-r.


ARIOBARZANE III, surnommé Eusèbes Philoromæus, fils du précédent, monta sur le trône vers l’an 52 avant J.-C. Il parait qu’il fut obligé de faire de grands sacrifices pour acheter la protection du peuple romain, et lorsque Cicéron arriva dans la Cappadocd, peu de temps après l’avènement d’Ariobarzane au trône, il le trouva débiteur de sommes considérables envers Pompée et Brutus. Son autorité n’était pas non plus très-affermie ; Athénaïs, sa mère, femme altière, lui avait fait beaucoup d’ennemis, et les mécontents avaient proposé la couronne à Ariarathe ; mais l’union qui existait entre les deux frères rendit impossible toute tentative de ce genre. Cicéron, à qui ce prince avait été recommandé par le sénat, fit tout ce qui dépendait de lui pour l’assurer sur le trône. Le grand prêtre d’Enyo, ou Bellone, qui était la seconde personne de l’État et avait beaucoup de pouvoir, se trouvait à la tête des mécontents ; Cicéron l’obligea à sortir du royaume. Il parait que cet Ariobarzane avait rendu quelques services aux Athéniens, car ils lui avaient érigé une statue dont il nous reste l’inscription. Après la mort de César, il prit le parti des triumvirs contre les meurtriers, et Cassius, qui se trouvait en Asie, le fit assassiner, et s’empara de ses trésors vers l’an 42 avant. J.-C. C-r.


ARION, de Méthymne, célèbre lyrique grec, fils de Cyclée et disciple d’Alcman, s’illustra vers la 38e olympiade, selon Larcher (dans sa Chronologie d’Hérodote), l’an du monde 4088, avant J.-C. 620. Hérodote rapporte qu’il vécut contemporain de Périandre, tyran de Corinthe ; qu’il fut le plus habile musicien de son siècle sur la lyre ; et que c’est à lui qu’on doit l’origine et le nom du dithyrambe. Il avait composé un grand nombre de poésies lyriques, dont il ne nous reste aujourd’hui qu’un hymne en l’honneur de Neptune, conservé par Ellen (Hist. des Animaux, liv. 12, c. 45), et transporté, avec des corrections, par Brunck, dans ses Analecta, t. 3, p. 337. Arion introduisit un nouveau mode musical dans la tragédie, assujettit les satires des chœurs au langage métrique, et donna le nom de dithyrambe au chant de ces mêmes chœurs. On raconte qu’après avoir amassé de grandes richesses à la cour de Corinthe, il s’était embarqué sur un vaisseau avec toute sa fortune, pour retourner dans sa patrie ; que les matelots ayant voulu le jeter à la mer pour s’emparer de ses trésors, il obtint de jouer auparavant un air funèbre sur sa lyre ; et qu’un dauphin, attiré par le charme de sa mélodie, le reçut sur son dos au moment où il se précipita dans les flots, et le porta jusqu’au cap Ténare, d’où Arion retourna à Corinthe. Après avoir érigé une statue dans le temple d’Apollon pour consacrer cet événement, Périandre fit mourir tous les coupables, et élever un tombeau au dauphin dont le nom fut aussi donné à une constellation. Toute fabuleuse que peut paraître cette histoire, elle a été très-accréditée dans l’antiquité, et la poésie, comme la sculpture s’est souvent plu à la célébrer ; ce qu’il y a de positif, c’est qu’Arion fit naufrage vers les côtes de Laconie, se sauva sur le cap Ténare, où on l’accueillit avec humanité, et érigea dans le temple d’Apollon, situé sur le même promontoire, une statue de bronze, comme monument de sa reconnaissance. Le distique qui l’accompagnait se trouve également dans les Analecta (même vol., p. 338). A-D-r.


ARIOSTE (Louis) naquit à Reggio de Modene, le 8 septembre 1474, d’une famille noble, et d’un père qui, ayant été attaché longtemps au duc de Ferrara, Hercule Ier. et l’ayant servi dans divers emplois, fut fait par lui juge du premier tribunal de Ferrare. Louis fut l’aîné de dix enfants ; il montra des dispositions poétiques dans les jeux mêmes de son enfance ; il composait des espèces de tragédies qu’il représentait avec ses frères : il en fit une, entre autres, de Pyrame et Thisbé. Entré au collège à Ferrare, il se distingue dans ses études ; et il était à peine dans sa première adolescence, qu’il y prononça, pour l’ouverture des cours, une harangue latine qui fit concevoir de lui les plus grandes espérances. Son père, comme les pères de plusieurs autres grands poètes, voulut qu’il étudiât les lois : après cinq ans de dégoûts et d’efforts inutiles, le jeune Arioste y renonça, pour se livrer entièrement aux lettres. Il suivit alors les leçons du savant Grégoire de Spolete. Plante et Terence, qu’il expliquait, lui donnèrent l’idée de deux comédies, la Cassaria et i Suppositi, qu’il ébauche des ce temps-là. Des poésies lyriques, italiennes et latines, remarquables par l’élégance et la facilité du style, le firent connaître du cardinal Hippolyte d’Est, fils du duc Hercule Ier. Hippolyte se l’attacha, vers l’an 1503, en qualité de simple gentilhomme ; mais il ne tarda pas à l’employer dans ses affaires même les plus importantes ; et, à la mort d’Herculo, Alphonse, frère du cardinal, ayant succédé a leur père, n’accorda