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Tournefort, Aubriet devint un habile botaniste ; aussi ne négligea-t-il aucun détail, et il fit entrer dans ses dessins les plus petites parties, surtout celles des fleurs, et il en exprima toujours le nombre, la forme et les proportions relatives, avec beaucoup d’exactitude, quoiqu’on n’y fit pas beaucoup d’attention alors. Tournefort lui-même ne les mentionna pas toujours dans ses descriptions. Il ne faut pas croire pour cela que celui-ci ne les eût pas remarquées. C’est un reproche très-gratuit que lui fait Linné, qui va même jusqu’à faire entendre qu’Aubriet était plus habile botaniste que Tournefort. Tout porte à croire que le peintre n’exprimait que ce qui lui était indiqué par le naturaliste.


AUBRION (Jean), chroniqueur exact, mais crédule, souvent cité par les historiens lorrains, vivait à la fin du 15e siècle. Sa coopération aux affaires de la république messine (de Metz) rend son témoignage précieux, car il a été témoin ou acteur de la plupart des événements qu’il raconte. Député deux fois par ses compatriotes vers Charles le Téméraire, il tomba, en 1471, revenant de Bourges, dans un parti bourguignon, qui porta sa rançon à 100 florins du Rhin. Six années plus tard, il eut

une autre mission de Louis XI, qui était alors à Nogent ; enfin ce fut lui qui, en 1492, fit rejeter par les autorités de Metz les prétentions du duc de Lorraine, relatives à l’imposition d’un subside extraordinaire sur la ville. Le journal de Jean Aubrion, contenant tout ce qui s’est passé in Metz et aux environs depuis 1477 jusqu’en 1581, est écrit d’un style peu soigné, mais il contient des particularités intéressantes. On a dit que l’original est a la bibliothèque du roi ; mais M. Audiffret assure qu’il n’y existe pas. Nous n’en connaissons que deux copies. Ce chroniqueur est mort à Metz, le 10 octobre 1501.

B—n.


AUBRIOT (Hugues), né à Dijon, au sein d’une riche famille de la bourgeoisie, qui comptait parmi ses membres un évêque de Chalons-sur-Saône, entra à la cour de France par la protection du duc de Bourgogne, Philippe le Hardi, son seigneur, et y obtint un avancement rapide. Charles V, juste appréciateur de son aptitude pour les affaires, le nomma prévôt et capitaine de Paris vers 1564. Chargé à la fois de la police, de la surveillance des métiers, vivres et marchandises, de l’administration des finances, de l’intendance des bâtiments et du gouvernement militaire de la plus grande ville du royaume, d’une ville que la guerre civile, la guerre étrangère, la contagion et la famine avaient réduite à un état déplorable, au sortir d’une crise effrayante qui avait épuisé l’argent et les forces du royaume et porté une rude atteinte à l’autorité royale, Aubriot, dans ces circonstances difficiles, se montra constamment à la hauteur de ses fonctions, et seconda efficacement Charles V dans l’œuvre de réparation si heureusement accomplie par ce prince. Les dix-sept années que dura son administration furent marquées par d’immenses travaux nécessaires à la défense, à la salubrité et à la prospérité de la capitale. Il acheva d’abord les fortifications commencées par Marcel du côté de l’orient. Les fossés furent creuses, élargie, revêtus de murailles, flanqués de grosses tours, et accompagnés d’un arrière-fossé qui avait, en quelques endroits, seize pieds de profondeur sur trente-six de largeur. Les deux lignes de fossés furent remplies d’eau et garnies d’écluses. Ces ouvrages étaient presque terminés en 1567 ; le roi vint plusieurs fois les visiter. En 1569, la guerre ayant recommencé avec les Anglais, Aubriot soumit à son maître le plan d’une forteresse destinée à mettre le quartier St-Antoine à l’abri de leurs insultes, et posa, le 22 juillet 1370, la première pierre de cette Bastille élevée contre l’étranger, et dont les canons devaient être, quatre siècles plus tard, retournés contre un peuple en fureur. Il bâtit ensuite le pont St-Michel et les quais qui enfermaient en grande partie les deux rives de la Seine. Le petit Chatelet, la quatrième enceinte de Paris et les premiers égouts souterrains furent également construits sous son administration. En même temps qu’il présidait a ces grands travaux, auxquels il employa les vagabonds et les mauvais sujets, et qui suffiraient seuls pour recommander sa mémoire a la postérité, Aubriot s’occupait à purger la ville des voleurs et des malfaiteurs dont elle était infestée depuis les troubles ; il réorganisait la milice bourgeoise et le service du guet, soumettait-il de sages règlements le commerce et l’industrie, réformait les abus, et s’appliquait à faire régner partout la tranquillité, l’ordre et la justice. Magistrat vigilant, actif, sévère, rigide exécuteur des lois, mais intègre, et pesant avec les mêmes poids le riche et le pauvre, le fort et le faible, le peuple le craignait et l’aimait. Le zèle et l’habileté qu’il déployait dans l’exercice de ses fonctions le firent entrer fort avant dans la faveur de son maître. Il paraissait souvent en public à la droite de ce prince, avait avec lui des entretiens particuliers, et assistait aux conseils publics et privés. Il se servait adroitement de ses richesses pour maintenir et consolider son pouvoir : si quelque grand seigneur ou quelque courtisan témoignait du mécontentement en voyant les honneurs et le crédit dont jouissait un parvenu, il l’apaisait par des prêts d’argent, par de riches présents ou de somptueux repas. Mais, pour son malheur, Aubriot s’était fait des ennemis plus dangereux. Au 14e siècle, le roi ne régnait pas sur tout Paris ; il partageait le gouvernement de cette ville avec deux puissances ombrageuses et jalouses : l’université et l’évêché. Les juridictions du recteur, de l’évêque et du prévôt se touchaient, et ce dernier devait user de ménagements infinis pour vivre en bonne intelligence avec ses voisins. Aubriot tint une conduite toute différente. À peine installé dans ses fonctions, il se brouille avec l’université, en refusant de lui prêter le serment d’usage, sons prétexte qu’il n’était pas tenu de le faire en public, et en ne s’y soumettant qu’avec restriction au bout de trois ans. Il tenta plusieurs fois de restreindre les privilèges de ce corps et se rendit la terreur des écoliers. Ceux-ci étaient dans l’habitude de descendre le soir dans la Cité pour y prendre leurs ébats aux dépens des bourgeois, qu’ils empêchaient de dormir. Le prévôt leur fit