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était déjà très-âgé, ne voulut pas s’exposer a faire la guerre, et se soumit à toutes les conditions qu’Antiochus lui imposa. Tandis qu’il était dans ces pays éloignés, Achæus ceignit le diadème, et se fit reconnaître roi des pays dont il était satrape. Antiochus, de retour dans la Syrie, reprit la guerre contre Ptolémée, et s’empara de plusieurs villes de la Palestine et de la Phénicie, vaincu par ce prince à Raphia dans la Palestine, il fut obligé d’abandonner toutes ses conquêtes, et se trouva trop heureux d’obtenir une trêve d’un an, dont il profita pour aller soumettre Achæus, qu’il prit et fit mourir. Il attaqua bientôt Arsace, roi des Parthes, qu’il força à demander la paix, et à se réunir à lui contre Euthydéme, roi de la Bactriane, à qui il accorda aussi la paix : puis traversant le mont Paropamisus, il s’avança jusqu’à l’Inde. Après avoir parcouru et soumis l’Arachosie, la Drangiane, la Carmanie, la Perse, la Susiane, la Babylonie et la Mésopotamie, il revint dans son pays, couvert de gloire, et ses sujets lui donnèrent le surnom de Grand, qu’il avait bien mérité en rendant au royaume de Syrie son ancienne splendeur. Le reste de sa vie ne répondit pas à ces brillants commencements ; Ptolémée Philopator étant mort l’an 204 avant J.-C., Antiochus se réunit avec Philippe, roi de Macédoine, pour dépouiller de ses États Ptolémée Épiphanes son fils, qui n’avait que cinq ans ; mais le peuple romain, que son père lui avait nommé pour tuteur, s’opposa à cette invasion ; et comme la puissance de ce peuple était déjà redoutable, Antiochus n’osa rien entreprendre. Les ambassadeurs de Rome l’empêchèrent aussi de faire la guerre à Attale, roi de Pergame. Il eut bientôt de nouvelles difficultés avec les Romains, au sujet de quelques villes de l’Asie Mineure dont il s’était emparé ; tandis qu’on négociait à ce sujet, Annibal vint se réfugier auprès de lui, et l’excita à faire la guerre aux Romains, en allant les attaquer dans l’Italie même. Antiochus ne suivit pas son conseil ; mais, quelque temps après, il se rendit à l’invitation des Étoliens, qui avaient pris les armes contre les Romains, et passa dans la Grèce avec 10,000 hommes : l’Eubée s’étant soumise sans résistance, il se rendit dans la Thessalie, où les Étoliens, les Athamanes et les Thébains se joignirent à lui ; mais effrayé par l’apparition de quelques troupes que les Romains avaient envoyées en avant, il retourna à Chalcis dans l’Eubée, y devint amoureux d’une jeune fille, qu’il épousa, et y passa l’hiver dans les plaisirs, ce qui affaiblit beaucoup son armée. Au printemps, il retourna dans la Thessalie ; et, sentant qu’il n’avait pas des forces assez considérables pour se mesurer avec les Romains qui s’avançaient à grands pas, il fortifia le passage des Thermopyles, et fit garder les défilés par lesquels les Persans avaient pénétré dans la Grèce, espérant arrêter l’armée romaine jusqu’à ce que les secours qu’il attendait de l’Asie fussent arrivés ; mais un corps de Romains, commandé par Caton l’Ancien, ayant trouvé le moyen de franchir la montagne malgré les Étoliens, le prit à dos, tandis que le consul Manius l’attaquait par devant ; il ne lui fut plus possible alors de retenir son armée, qui prit la fuite ; il eut beaucoup de peine a s’échapper lui-même, avec cinq cents cavaliers ; tout le reste fut tué ou fait prisonnier. Antiochius alla s’embarquer à Chalcis, d’où il retourna à Éphèse. Prévoyant alors que les Romains viendraient l’attaquer en Asie, il rassembla des forces considérables dans le voisinage de la mer, mit de fortes garnisons à Sestos et Abydos, par où il fallait que les Romains passassent pour arriver en Asie, fortifia la Chersonèse de Thrace, et fit de grands amas de vivres et de ramifions de guerre à Lysimachie, ville qui devait lui servir de place d’armes ; mais ayant appris quelque temps après que son escadre, commandée par Polyxénidas, avait été battue par les Romains auprès de Myonnésos, il perdit la tête, abandonna toutes les places qu’il avait fortifiées, et se retira à Sardes. Scipion le Jeune, général de l’armée romaine, qui avait pour lieutenant Scipion l’Africain son frère, ne tarda pas à profiter de sa fuite et à passer en Asie. Antiochus fit faire des propositions de paix ; on lui répondit qu’il ne l’obtiendrait qu’en abandonnant toute l’Asie en deçà du Taurus. Ces conditions étaient dures, et Antiochus se prépara au combat ; il avait 70,000 hommes, et les Romains n’en avaient pas plus de 30,000 : ils remportèrent cependant une victoire éclatante. Antiochus fut obligé de demander la paix une seconde fois, et il l’obtint aux mêmes conditions, en s’obligeant de plus à livrer tous ses éléphants, a n’avoir qu’un certain nombre de vaisseaux, et à payer 15,000 talents ; enfin, à donner vingt otages, du nombre desquels fut son propre fils. Peu de temps après, Artaxias et Zadriades, satrapes de l’Arménie, se révoltèrent. Avant d’aller les soumettre, il fit reconnaître roi Séleucus, son fils aîné ; et comme il avait besoin d’argent, il entreprit de piller de nuit le temple de Jupiter, ou plutôt de Bélus, dans le pays des Élyméens ; mais les habitants se réunirent et le massacrèrent ainsi que les troupes qui l’accompagnaient, l’an 187 avant J.-C. Aurélius Victor rapporte différemment sa mort. Il dit qu’Antiochus fut tué dans une fête, par un de ses hôtes qu’il avait insulté. Il était âgé de 52 ans, et en avait régné 56. Il avait épousé Laodice, fille de Mithridate, roi de Pont, dont il eut cinq fils et quatre filles. C-r.


ANTIOCHUS IV, fils du précédent, fut élevé à Rome, où son père l’avait envoyé en otage. Séleucus IV, son frère aîné, voulant le faire revenir auprès de lui, envoya Démétrius, son propre fils, à Rome, pour le remplacer. Arrivé à Athènes, Antiochus apprit la mort de séleucus ; il prit aussitôt le titre de roi, vainquit Héliodore, qui avait usurpé l’autorité, et il se fit reconnaître par les Syriens. Le commencement de son règne ne fut remarquable que par ses extravagances ; il s’échappait quelquefois de son palais, sans que ses ministres le sussent, et, suivi de deux ou trois personnes, courait les rues d’Antioche, s’arrêtait dans les boutiques des orfèvres, avec qui il s’amusait à disputer sur leur art, qu’il prétendait connaître aussi bien qu’eux. Souvent il allait boire avec des étrangers ou des gens de la lie du peuple. D’autres fois, il se dépouillait de la pourpre, et pour imiter ce qu’il avait vu faire à Rome, il allait sur la place publique, et faisait la cour à ceux qu’il